Épisode 1
Madame « S » dirigeait le département multimédia de l’entreprise « T », à l’origine, fleuron de l’industrie militaire française. Treize salariés œuvraient à la communication photo, vidéo et … multimédia d’une entreprise de 50 000 salariés. Ce terme « multimédia » avait sûrement remplacé celui d’ »audiovisuel », qui lui-même avait en son temps détrôné celui de « photothèque ». J’ai rendu visite à cette dame il y a deux ans; elle semblait bien démoralisée, visiblement même dépressive, car le service était promis au démantèlement. Madame « S » venait d’être priée d’élaborer un plan social pour son équipe. À cet instant de l’histoire, l’envi de plaisanter disparaît. Le service était le dernier résident d’un siège récent ultramoderne. Curieusement, l’entreprise venait de décider de réintégrer son ancien immeuble. C’est donc un hall immense, pavé de marbre et orné de palmiers majestueux, mais couvert de poussières, que nous traversâmes pour rejoindre ses bureaux. Je passerai les détails, après quinze années d’activité, son incompréhension et la longue énumération des difficultés à vivre cette transition qui s’achèvera finalement par un essaimage. Voyons plus loin. Arguant des mérites de son service auprès de son supérieur hiérarchique, pour défendre son budget, Madame « S » avait réclamé des subsides pour optimiser la gestion de la photothèque. Vous comprenez, disait-elle à son interlocuteur, nous avons un fonds riche de 50 000 images. La réponse fut cinglante. Madame « S » s’est entendu dire que cela importait peu et que les 50 000 iraient bientôt « au feu ».
Une triste histoire que cet épisode pour rappeler combien les archives et la mémoire des entreprises sont fragiles. Mais sommes nous toujours convaincants dans la défense de nos compétences et des budgets nécessaires au développement de nos services photos ? Pensons-nous, au-delà de toute culture de photographe, de documentaliste et de passionné d’images à apporter la garantie nécessaire de « rentabilité » de la préservation et de la valorisation des fonds iconographiques ? Ces fonds sans cesse croissants, à n’y prendre garde ne deviennent-ils pas des hydres non maîtrisables, aux missions incertaines, pour des entreprises subissant dans leurs métiers des restructurations profondes?…
Épisode 2
Madame « S » m’avait communiqué les coordonnées téléphoniques de son supérieur, je le contactais donc un mois plus tard. Sans mettre en avant des mots « suicidaires » du type « mémoire de l’entreprise », j’arrivais à échanger sur l’avenir de la photothèque et commençais à comprendre la vision d’un des directeurs adjoints de la communication d’une entreprise de plus de 50 000 salariés (tiens, une image par salarié!).
La chute est là, j’ai entendu mon interlocuteur me préciser qu’il travaillait au quotidien sur son PC avec 300 images, réparties dans des sous-dossiers et que finalement, il se demandait si cela n’était pas suffisant! Depuis, je m’interroge sur la pertinence de proposer l’entretien de fonds photographiques sans garantie de pérennité, fragilisé au gré des changements de responsables, des fusions et autres restructurations plus ou moins profondes. Contre ce genre de tempête, et tout en œuvrant pour la défense d’une certaine idée du patrimoine, ne devons nous pas au quotidien faire la promotion d’une gestion pragmatique de fonds à la volumétrie restreinte, de la portabilité des documents numériques, en adoptant des règles strictes de bonne gestion des métadonnées ?
Conseil en organisation des médias en entreprise
Mots-clefs : archivage
magnifique
[...] à une sélection efficace des images. * voir la règle des 80/20% ** voir l’article « 50 000 images à mettre au feu ! » *** voir l’article « Le syndrome de compétence » Daniel Hennemand, [...]