Je ne crois pas qu’il faille dénigrer ces nouveaux acteurs. Ils sont là, émergeants, et ils proposent progressivement une partie des services jusqu’ici assurés par les professionnels. La chaîne traditionnelle s’en trouve bien sûr fragilisée. Nous, professionnels de l’image, photographes, documentalistes, iconographes, mais aussi développeurs, concepteurs ou fabricants sommes soumis à cette dure loi de la contraction des métiers et de la gratuité.Cependant, il nous faut voir la multitude, non pas comme une banalisation, mais comme un enrichissement sans précédent.Si nous sommes photographes, la confrontation de nos créations est inéluctable et il ne faut pas la craindre ou alors, c’est que nous sommes bien fragiles! Faire un distinguo entre amateurs et professionnels utilisant les mêmes outils va vite devenir problématique. Mais entre produire un visuel numérique et concevoir une image ? Qui apporte une réelle plus-value ? Il s’agit donc, dans un premier temps, de s’informer avant de manifester et de se battre non pas en relevant les pont-levis, mais en valorisant nos compétences. Sans doute, celles-ci doivent être réparties différemment. Les formations prendront en compte l’évolution du marché et de la demande. Ces mutations nous remettent en cause, mais elles apportent par ailleurs un extraordinaire potentiel de communication et de développement. Ce ne sont pas les plates-formes qui sont dangereuses – par exemple, elles communiquent mieux que certaines photothèques d’entreprise l’information sur les droits d’auteur – mais leur pouvoir d’addiction est terrible, et j’inclus les professionnels, puisque certaines entreprises commencent à utiliser ces services. J’évoque ici l’absence de gestion des métadonnées dans les fichiers (lire les analyses de Patrick Peccatte). Sorties de ce contexte, les images deviennent anonymes! Certains grands médias en ligne ou photothèques diffusent d’ailleurs toujours des images sans métadonnée! Il faut donc, non pas dénigrer, mais comprendre, tester, et intégrer ces offres dans notre compréhension de la nouvelle communauté de l’image; particulièrement en valorisant les tâches, c’est-à-dire des métiers, en amont et en aval de la diffusion-partage gratuite, comme la conception, la retouche, l’editing, l’indexation, et l’archivage…Les outils de gestion propriétaires sont peut-être condamnés, en revanche la valorisation des contenus est plus que d’actualité et les services vont donc se développer. En résumé, certains perdent leurs privilèges, d’autres devront développer de nouvelles expertises.
Rassemblement sur la passerelle des Arts à Paris lors de l’éclipse de 1999 ou « Chercher à voir », © Daniel Hennemand